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Chants de mer, de marins et autres...
2 janvier 2007

La main sanglante

Un jour de cet été, nous avons eu la chance de passer une soirée sur le Sillon de Talbert avec un conteur de grand talent : Yann Quéré (http://yann.quere.monsite.wanadoo.fr/page1.html) qui nous a raconté l'histoire de la bague du Prince noyé, volée par une couturière qui voulait changer de vie.

Il y a des variantes de cette histoire et je ne résiste pas à la tentation de vous inviter à lire celle-ci, extraite du célèbre livre d'Anatole Le Braz, "La Légende de la Mort" que l'on doit d'ailleurs absolument lire avant de se promener dans les Côtes d'Armor, (tiens au hasard du côté du Ménez-Bré...) mais qui cette fois se déroule près du Cap Sizun...

"Un pêcheur de Goulien, dans le Cap-Sizun, trouva un jour, en mer, le cadavre d'une noyée. Comme il l'amarrait derrière sa barque pour la remorquer à terre, il s'apeçut qu'elle portait au doigt une belle bague d'or. Le malin Esprit lui souffla l'idée de s'emparer de cette bague. Il était seul à bord de son bateau et, par conséquent, assuré de n'être vu de personne. Il saisit donc le bras de la morte, mais la chair du doigt avait gonflé : impossible d'en faire glisser l'anneau.
Alors le pêcheur tira de sa poche son couteau de marin, à lame forte et tranchante, et, pour avoir le bijou, trancha le doigt de la noyée.
Aussitôt - chose étrange - la blessure se mit à saigner comme si le cadavre était encore vivant. Et le sang coulait en telle abondance que tout le sillage de la barque, au loin, en était rouge.
Arrivé à terre, le pêcheur s'empressa d'enfouir le cadavre dans le sable de la grève, sans prévenir ni maire, ni clergé. Puis il gagna son logis, avec la bague. Sa femme l'attendait pour souper. Ils se mirent à table. Tout à coup, la femme ayant tourné par hasard les yeux vers la fenêtre, s'écria :
- Jésus, mon Dieu ! Regarde donc, Jean-Clet, qu'est-ce que cela signifie ?
Il leva la têt, regarda, lui aussi. A la vitre supérieure de la fenêtre était appliquée la paume d'une main verdâtre à laquelle un doigt manquait, et, de la partie mutilée un mince filet de sang descendait, descendait sans fin, le long du verre.
L'homme , qui avait gardé pour lui le secret de son aventure, devint tout pâle.
- Attends, dit-il, je vais voir dehors ce que c'est.
Et il sortit. A l'instant, la main disparut.
- Reviens ! lui cria sa femme... On en la voit plus.
Il rentra, mais il n'eut pas plus tôt repris sa place à table que de nouveau la main fut visible. La femme dit :
- Sûrement, il y a quelque malheur sur nous !
- Bah ! répondit le pêcheur, nous avons peut-être la berlue, l'un et l'autre. Ne pensons plus à cela, et allons nous coucher.
Il espérait qu'une fois dans leurs couvertures et derrière les volets du lit clos, ils cesseraient de voir... Il se trompait, car, dès qu'il eutsoufflé la chandelle et que l'intérieur de la maison fut tout entier dans la nuit, la main apparût en clair sur le noir de la fenêtre : on eût dit qu'elle brillait dans l'ombre, et le sang qui s'en épanchait faisait comme une traînée de feu. Alors, l'homme, épouvanté, sz confessa : il dit à sa femme le forfait qu'il avait commis.
- Vous n'avez qu'un parti à prendre, déclara celle-ci : c'est d'aller au plus vite enterrer la bague avec le cadavre. Puis, demain, vous passerez chez le recteur et vous lui commanderez une messe pour "une personne inconnue".
ainsi fit le pêcheur. Et la main sanglante ne se montra plus. (Conté par Le Bour. - Audierne)"

Juste un petit commentaire : édifiant, mais dommage que ça n'arrive pas à ceux dont la fortune est bâtie sur des tas de cadavres...

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